19 septembre 2007

L'abolition comme solution la plus réaliste

Beaucoup de militants animalistes, dont je suis, voient l'abolition de la viande comme une étape sur le chemin d'une société de moins en moins spéciste (d'autres parleraient d'une étape "vers la fin de toute exploitation animale").

Sans renier cette perspective, il est en une autre, complémentaire, qu'il nous faut développer pour renforcer le soutien à l'idée d'abolition. Il nous faut montrer que l'abolition de la viande est la solution la plus réaliste à ce que notre société considère déjà comme des problèmes sérieux de la production de viande.

En effet, outre les questions environnementales (pollution, etc.), sanitaires (zoonoses, etc.) et économiques (subventions, etc.) posées par la production de viande, la question des conditions de vie -et de mort- des animaux dans les élevages est elle aussi déjà considérée comme importante(1), et problématique, par beaucoup de gens. Ainsi des pratiques d'élevages tels l'enfermement en cage, l'entassement en bâtiments fermés, ou les mutilations à vif font déjà l'objet de fortes réprobations du public(2).

Mais s'il est assez bien admis que l'on puisse refuser à titre personnel de consommer les produits animaux, dès lors qu'il s'agit de solutions collectives à ces problèmes, seule l'amélioration des conditions d'élevage est considérée comme une approche réaliste. La thèse implicite est qu'à force d'améliorer les conditions d'élevage on finira par arriver à une situation acceptable pour les animaux. Et qu'il est irréaliste, utopique, d'abolir la viande.

Un défi auquel est confronté notre mouvement est de montrer que ce qui est utopique, ce n'est pas d'imaginer une société sans viande, mais de croire que l'on puisse arriver un jour à offrir une vie correcte et une mort sans souffrance aux plus d'un milliard d'animaux tués chaque année pour la viande en France.

A mesure que la question de l'abolition fera débat, on nous demandera avec de plus en plus d'insistance : "pourquoi abolir s'il existe d'autres moyens de résoudre les problèmes ?"

Outre de rappeler que l'abattage est déjà en soi un problème, à nous de demander à notre tour comment concrètement pourrait-on produire les centaines de milliers de tonnes de viande, les milliards d'oeufs, qu'on produit chaque année en France sans que les animaux en pâtissent fortement comme aujourd'hui ? A nous de demander comment, de manière réaliste, un éleveur qui produit de la viande de poulets avec des dizaines de milliers d'oiseaux pourrait, avec toute la bonne volonté du monde, leur offrir des conditions de vie correctes ? Comment, par exemple, pourrait-il soigner ses animaux malades alors qu'il n'a même pas le temps de les passer chacun en revue du regard chaque jour ?

A ceux qui expliquent que l'abolition est irréaliste, mais qui reconnaissent les problèmes posés aujourd'hui par la production de viande, demandons : combien d'hectares supplémentaires faudrait-il allouer aux filières d'élevage ? Combien de milliers (de millions ?) de personnes faudrait-il payer pour s'occuper correctement des animaux ? de combien, en conséquence, multiplier le prix de la viande ? Et quelles autres solutions couteuses faudrait-il encore mettre en oeuvre ? Notre société est-elle réellement prête à de telles extravagances pour un produit dont il est de plus en plus connu qu'il n'est en rien nécessaire pour vivre en bonne santé ?

La question de savoir si l'approche actuelle (résoudre les problèmes de la production de viande par améliorations successives) est réaliste ou non n'est aujourd'hui presque jamais discutée. En effet :
  • ceux qui mangent ou produisent de la viande, comme ceux qui oeuvrent à améliorer les conditions de production, ont un fort intérêt à la croire vraie car elle légitime leurs activités(3) ;
  • quant aux militants favorables à l'abolition de la viande, beaucoup d'entre eux se désintéressent de cette question sur l'argument qu'il n'est de toutes façons pas légitime de tuer des animaux pour les manger (ou que toute exploitation, même sans souffrance, ne serait pas acceptable).

Argumenter qu'éthiquement la production de viande n'est pas légitime ne devrait pas nous empêcher de montrer que l'approche aujourd'hui mise en oeuvre pour résoudre les problèmes causés par cette production est bien moins réaliste que son abolition.

Antoine Comiti

(1) Dans un sondage fin janvier 2004 pour l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture et la revue 60 Millions de consommateurs, à la question « Concernant les conditions de l’exercice de l’agriculture, quelle importance accordez-vous au bien-être animal ? », 78% des sondés ont répondu « beaucoup ». Les résultats complets de ce sondage réalisé sur un échantillon représentatif de 1002 personnes sont disponibles sur http://minilien.com/?XiGWdB14tH

(2) Ainsi, selon un sondage réalisé fin octobre 1999, 95,2% des personnes interrogées estiment qu’« en élevage intensif, les animaux n’ont pas assez d’espace » et 80,5% estiment que « les mutilations sont inadmissibles ». Sondage sur un échantillon représentatif de 874 personnes réalisé à l’initiative de l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) avec la participation financière de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) ; cité dans Florence Burgat, « La demande concernant le bien-être animal », Le Courrier de l’environnement de l’INRA, numéro 44, octobre 2001, http://brg.jouy.inra.fr/Internet/Produits/dpenv/burgac44.htm.

(3) Il ne s'agit pas ici de remettre en cause le rôle généralement positif, selon moi, que jouent les campagnes (non-spécistes) d'amélioration des conditions d'élevage qui, outre qu'elles servent les animaux concernés, contribuent à faire voir à un large public la réalité de la production de viande et à rappeler que les animaux dits d'élevage sont, comme nous, des êtres sensibles.

15 juin 2007

Abolir la viande, ce n’est pas abolir le spécisme

Vouloir abolir la viande peut paraître follement ambitieux. Le premier obstacle est d’ailleurs là : rendre pensable que la viande puisse être abolie. Et au vu du nombre colossal d’individus concernés, l’abolition sera un évènement considérable.

Mais c’est en même temps un objectif bien modeste. Modeste parce que la viande n’est évidemment pas la cause de toute vie ou mort misérable sur cette planète. Elle est même une source de plaisir pour beaucoup – humains ou non – dont la vie peut être misérable par ailleurs.

Modeste aussi parce qu’abolir la viande, ce n’est pas abolir le spécisme : on peut trouver inacceptable ce que les humains font endurer aux animaux pour les manger, tout en continuant de penser que ce que ressent une bête compte moins que ce que ressent un humain.

Qu’on le regrette ou non, l’abolition de la viande n’exige donc pas des gens qu’ils remettent radicalement en cause la place des humains parmi les êtres vivants, encore moins qu’ils changent totalement de vision du monde et de ce que doit être la société. C’est une des raisons qui rend cette abolition atteignable dans le monde tel qu’il est.

Cela dit, il est clair aussi que débattre sur l’abolition de la viande, c’est discuter de l’importance à accorder aux intérêts des divers individus concernés, humains ou non. Et que la résistance à cette abolition sera tout autant idéologique qu’économique.

Mais il reste qu’abolir la viande, ce n’est pas abolir l’ensemble des idées et pratiques spécistes.

Erik Marcus, dans son livre « Meat Market(1) », fait ce parallèle avec l’abolition de l’esclavage :
« Les efforts visant à démanteler l'industrie de l'élevage seront sans aucun doute comparés au mouvement d'abolition de l'esclavage du 19e siècle. [...] les deux mouvements sont identiques sur un aspect : aucun des deux ne cherche à atteindre la perfection. Après la guerre de Sécession, les Noirs américains ont continué à souffrir d'épreuves comme la ségrégation et la discrimination [...]. Une bonne partie de cette oppression post-abolition aurait certainement pu être prévue par la direction du mouvement abolitionniste. Pourquoi leur programme était-il alors si limité ? Ce n'est pas une quelconque paresse ou complaisance qui explique ces limitations du programme abolitionniste. Ces limitations étaient en fait la pierre angulaire d'une brillante stratégie. A cette époque, l'esclavage était le plus grand tort infligé aux Noirs par les Blancs. [...]

La grande réussite de l'idée d'abolition était de reconnaître que, quelques fussent vos opinions sur la question de la race, vous n'aviez pas besoin d'être terriblement progressiste pour considérer l'esclavage comme une abomination. [...] Beaucoup des gens qui ont combattu et sont morts pour abolir l'esclavage avaient des idées qui seraient aujourd'hui jugées racistes. Mais, pour soutenir l'abolition, les gens n'avaient pas à adhérer à l'idée d'égalité entre races. Les abolitionnistes demandaient seulement que les Américains reconnaissent l'esclavage comme étant un mal hideux et agissent pour y mettre fin. L'esclavage aboli, ce n'était plus qu'une question de temps avant que des formes plus subtiles d'oppression soient dénoncées et combattues. »

Antoine Comiti

(1) Dans ce livre en anglais paru en 2005, l’animateur du site Vegan.com explique pourquoi il pense impossible de réformer sérieusement les méthodes d’élevage, et appelle à développer un mouvement pour le "démantèlement de l'élevage" ("dismantlement of animal agriculture").

12 septembre 2006

Résolution pour l'abolition de la viande

Une résolution pour l'abolition de la viande a été écrite collectivement sur internet(1). La voici :
Parce que la production de viande implique de tuer les animaux que l'on mange,

parce que nombre d'entre eux souffrent de leurs conditions de vie et de mise à mort,

parce que la consommation de viande n'est pas une nécessité,

parce que les êtres sensibles ne doivent pas être maltraités ou tués sans nécessité,

l'élevage, la pêche et la chasse des animaux pour leur chair, ainsi que la vente et la consommation de chair animale, doivent être abolis.
(Texte révisé le 14 juin 2007)

(1) sur la liste de discussion abolitiongroup dont voici la présentation : "L'objectif de ce groupe est de développer et promouvoir la revendication politique d'abolition de la viande (toute chair animale). Pour y participer, il est demandé d'adhérer à cet objectif, et de se présenter (brièvement ou longuement) aux autres membres peu après son inscription."
http://fr.groups.yahoo.com/group/abolitiongroup/

23 août 2005

Quand l'abolition de l'esclavage paraissait chimérique

Le texte ci-dessous est constitué d'extraits du livre « Bury the Chains – Prophets and Rebels in the Fight to Free an Empire’s Slaves », d'Adam Hochschild, paru en 2005 chez Houghton Mifflin. Ce livre raconte l'histoire de la campagne d'abolition de l'esclavage en Grande-Bretagne aux 18 et 19e siècles. Je le conseille vivement à toute personne (lisant l'anglais) qui souhaite comprendre comment une minorité d'abolitionnistes a gagné à elle une majorité de l'opinion initialement indifférente, parfois même hostile à cet objectif qui semblait pourtant totalement chimérique à leurs contemporains
Antoine Comiti.

A Londres, en ce début d’année 1787, si vous disiez à un coin de rue que l’esclavage était moralement condamnable et qu’il devait être rendu illégal, neuf personnes sur dix se seraient esclaffées en vous prenant pour un hurluberlu. La dixième aurait peut-être été d’accord avec vous sur le principe, mais elle vous aurait assuré que mettre fin à l’esclavage était totalement impossible.

C’était un pays dans lequel la grande majorité des gens, des paysans aux évêques, acceptait l’esclavage comme complètement normal. C’était aussi un pays dans lequel les profits des plantations des Caraïbes dopaient l’économie, où les taxes douanières sur le sucre cultivé par les esclaves était une source importante de revenu pour le gouvernement, et où les moyens d’existence de dizaines de milliers de marins, de marchants et de fabricants de vaisseaux dépendaient du commerce des esclaves. Ce commerce lui-même avait pris une ampleur quasiment sans précédent, apportant la prospérité à des villes portuaires - Londres elle-même y compris. De plus, sur vingt anglais, dix-neuf n’avaient même pas le droit de vote. Privés eux-mêmes de ce droit le plus basique, comment pouvaient-ils être amenés à se préoccuper des droits d’autres gens, d’une couleur de peau différente, de l’autre coté de l’océan ?

Ce monde de servitude semblait d’autant plus normal que quiconque regardait dans le passé ne voyait guère autre chose que d’autres systèmes esclavagistes. Les grecs et les romains avaient des esclaves ; les incas et les aztèques avaient des esclaves ; les textes sacrés de la plupart des grandes religions présentaient l’esclavage comme allant de soi. L’esclavage existait déjà avant l’apparition de la monnaie et de la loi écrite. C’est ainsi qu’était le monde – notre monde – il y a seulement deux siècles, et pour la plupart des gens de cette époque il était impensable qu’il puisse en être autrement.

Si l'on insistait auprès d’eux, certains britanniques concédaient peut-être que cette institution était certes déplaisante – mais d’où alors viendrait le sucre pour votre thé ? D’où les marins de la Royal Navy obtiendraient-ils leur rhum ? Le commerce des esclaves « n’est pas un commerce agréable », comme l’avait dit un membre du Parlement, « mais le commerce d’un boucher n’est pas non plus un commerce agréable, et pourtant une côtelette de mouton est, malgré cela, une très bonne chose. »

Il y avait bien des personnes prônant la fin de l’esclavage, mais elles étaient rares et dispersées.

Certes, un sentiment de malaise latent était dans l’air. Mais ressentir un vague trouble, à peine conscient, est une chose ; c’en est une autre que de croire qu'on puisse un jour changer cet état de fait. Le parlementaire Edmund Burke, par exemple, était opposé à l’esclavage mais pensait que l’idée même de mettre fin au commerce d’esclaves transatlantique (sans parler de l’esclavage lui-même) était « chimérique ». Malgré le malaise que des Anglais de la fin du 18e siècle pouvaient ressentir au sujet de l’esclavage, l’idée d’y mettre un terme semblait un rêve ridicule.

Quand les douze hommes du comité abolitionniste se sont réunis pour la première fois en mai 1787, la poignée de gens qui demandaient ouvertement la fin de l’esclavage ou du commerce esclavagiste étaient regardés comme des farfelus, ou au mieux comme d’incurables idéalistes. La tâche qu’ils entreprirent était si monumentale qu’elle paraissait impossible à n’importe qui d’autre.

Ces hommes, eux, considéraient non seulement que l’esclavage était une atrocité, mais aussi que c’était quelque chose de soluble. Ils pensaient que puisque les humains ont cette capacité de se préoccuper des souffrances des autres, le fait d’exposer au grand jour la vérité inciterait les gens à agir.

En quelques années, la question de l’esclavage est venue au centre de la vie politique britannique. Il y avait un comité pour l’abolition dans chaque ville et commune d’importance. Plus de 300.000 britanniques refusaient de manger du sucre produit par des esclaves. Les pétitions d’abolition inondaient le Parlement de bien plus de signatures qu’il n’en avait jamais reçu sur aucun autre sujet.

Il y a quelque chose de mystérieux au sujet de l’empathie humaine et de ce qui fait que nous la ressentons dans certains cas et pas dans d’autres. Son jaillissement soudain, à ce moment particulier, a pris tout le monde par surprise. Des esclaves et des personnes asservies s’étaient continuellement rebellées au cours de l’histoire, mais la campagne en Angleterre était quelque chose de jamais vu auparavant : c’était la première fois qu’un grand nombre de personnes se sont mobilisées, et le sont restées pendant de nombreuses années, pour les droits d’autres gens. Plus étonnant encore : c’était pour le droit de personnes d’une autre couleur de peau, sur un autre continent. Personne n’était plus surpris de cela que Stephen Fuller, le représentant à Londres des planteurs de Jamaïque, un propriétaire de plantations lui-même et une figure centrale du lobby pro-esclavage. Alors que des dizaines de milliers de personnes protestaient contre l’esclavage en signant des pétitions, Fuller était sidéré qu’ils ne « mentionnaient aucune injustice ou préjudice d’aucune sorte qui les affectaient eux-mêmes. »

Les abolitionnistes ont réussi parce qu’ils ont relevé un défi auquel est confronté quiconque se préoccupe de justice sociale : rendre visible les liens entre le proche et le lointain. Souvent, nous ne savons pas d’où viennent les choses que nous utilisons, nous ignorons les conditions de vie de ceux qui les fabriquent. Le premier travail des abolitionnistes était de faire prendre conscience aux britanniques ce qu’il y avait derrière le sucre qu’ils mangeaient, le tabac qu’ils fumaient, le café qu’ils buvaient.

19 août 2005

La réprobation du meurtre des animaux dans l'opinion

D'après une étude(1) co-financée par le ministère de l'Agriculture, la réprobation du meurtre des animaux est déjà le fait d'une majorité de français pour la corrida et la chasse, et d'une minorité significative pour la viande :

L'idée qu'on puisse :
-tuer un animal au cours d’une corrida vous paraît normale
=> 88% pas d'accord(2)

-tuer un animal à la chasse vous paraît normale
=> 59% pas d'accord(2)

-acheter une volaille et l'abattre soi-même vous paraît normale :
=> 40% pas d'accord(2)

-tuer un animal à la pêche vous paraît normale :
=> 39% pas d'accord(2)

65% des personnes interrogées sont d'accord que « cela [les] dérangerait d'assister à l'abattage d'animaux ».

Il est normal que l'homme élève des animaux pour leur viande
=> 14% pas d'accord

La quasi-totalité des personnes qui ne sont pas d'accord qu'il est normal que l'homme élève des animaux pour leur viande, mangent elles-mêmes des animaux.

L'idée qu'on ne doit pas tuer un animal sans nécessité est suffisamment partagée dans l'opinion pour que le Code pénal (article R-655-1) l'interdise explicitement dans le cas des animaux "domestiques ou apprivoisés", c'est-à-dire en particulier dans le cas des animaux dans les élevages :
Section unique : Des atteintes volontaires à la vie d'un animal
Le fait, sans nécessité, publiquement ou non, de donner volontairement la mort à un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe.


L'affirmation « Il est normal que l'homme tue des animaux pour leur viande » (ou « Il est normal que l'homme tue des animaux pour les manger alors que cela n'est pas nécessaire pour vivre en bonne santé ») n'a pas été soumise. Il est vraisemblable qu'aujourd'hui déjà 14% au moins des personnes interrogées auraient exprimé leur désaccord.

Antoine Comiti

(1) « Le rapport à la viande chez le mangeur français contemporain », novembre 2004, consultable sur http://www.esc-toulouse.fr/m_pages.asp?page=480&menu=234
(2) Personnes se disant « plutôt pas d'accord » ou « pas d'accord du tout » parmi les 1.000 personnes interrogées.

17 août 2005

Mouvement pour l'abolition de la viande

La plupart des gens pensent qu'il ne faut pas tuer un animal sans raison sérieuse. En France, le Code pénal lui-même interdit de tuer, sans nécessité, une vache, un cochon ou un poulet.

Il est de plus en plus connu que la viande n'est pas nécessaire pour vivre en bonne santé.

Le temps n'est-il pas venu de demander l'abolition de la viande ?

Pourquoi ne pas faire de cette demande - énorme en apparence, et pourtant si simple - un objectif fédérateur du mouvement animaliste mondial ?

Certes, il faut continuer de décrire, de faire sentir, et de dénoncer, les souffrances et les privations endurées par les animaux. Il faut continuer de demander l'interdiction des pratiques jugées comme les plus choquantes : cages minuscules, mutilations, gavage, corrida, ... Il faut continuer de promouvoir la réalité et l'importance de leur sensibilité, comme de la nôtre. Continuer de remettre en cause le spécisme. De promouvoir le végétarisme et le végétalisme.

Mais cela ne suffit pas.

Il est devenu maintenant incohérent de ne pas exprimer clairement la demande politique de l'abolition de la viande.

Nous n'osons même pas formuler cette demande tant elle nous parait chimérique. Surtout, nous redoutons de passer pour des fanatiques qui veulent imposer leurs idées aux autres.

Nous avons tort. Tort de prendre le moindre mangeur de viande pour un défenseur des abattoirs. Tort de supposer -sans savoir- que la société ne serait pas encore prête à entendre cette demande, et encore moins à en débattre.

Au 18e siècle, l'esclavage des humains était légal, et une pièce maîtresse de l'économie coloniale. Il paraissait alors chimérique d'imaginer abolir cette pratique universelle et millénaire. Inspirons-nous des activistes d'alors qui se sont organisés pour la rendre illégale.

Oeuvrons à notre tour, chacun à notre manière, à une vaste campagne mondiale pour l'abolition de la viande.

Dans les messages à venir sur ce blog, je partagerai, petit à petit, le faisceau d'éléments qui m'a convaincu qu'un tel objectif peut être atteint dans de nombreux pays avant la fin de ce siècle.

Antoine Comiti

(Texte révisé le 13 octobre 2005)